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Docteur Fernand Dazé
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né le : 26 décembre
1902 à Sainte-Agathe-des-Monts
décédé le : 25 juin 1996
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Propos
recueillis par Richard Ouellet auprès de Louis Dazé,
fils du médecin juin 2009 |
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Biographie |
Fernand Dazé est né à
Sainte-Agathe-des-Monts, dans les Laurentides, le 26 septembre
1902. Son père exerçait la profession de médecin
et sa mère était fille de marchand général.
Après avoir complété un cours commercial
chez les Frères du Sacré-Cur, à Ste-Agathe,
Fernand Dazé fait son entrée au collège
Ste-Marie, rue Bleury, à Montréal, pour poursuivre
des études classiques. Nous sommes en 1915. Huit ans
plus tard il quitte le collège, un baccalauréat
ès arts en poche et s'inscrit à la faculté
de médecine de l'Université de Montréal.
Après une année de PCN (pour physique, chimie
et sciences naturelles), il se lance avec passion dans l'étude
de la médecine (1924-1929).
En 1935, la crise économique commence à s'atténuer.
Fernand Dazé, alors jeune médecin de 32 ans, ouvre
son bureau au 1824 de la rue Rachel. (Il est âgé
de 32 ans). Auparavant, il partageait un espace de travail avec
un confrère médecin sur la rue Gauthier. Cette
même année, le 8 juin, il prend pour épouse
Edna Larue, infirmière diplômée qui travaille
pour une compagnie d'assurances.
En 1979, le docteur Dazé célèbre cinquante
ans d'exercice de la médecine. Il reçoit du Conseil
des médecins et dentistes de l'Hôtel-Dieu de Montréal,
le titre de Médecin émérite ; la lettre
est signée du 12 juin 1981. Il décède le
25 juin 1996.
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Propos
recueillis par Richard Ouellet auprès de Louis Dazé,
fils du médecin juin 2009 |
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Pourquoi était-il surnommé
le médecin des pauvres? |
Le Plateau Mont-Royal était à
l'époque un quartier pauvre. C'était un quartier
ouvrier et les salaires étaient bas. La plupart des patients
payaient comptant mais un certain nombre le faisait à
la semaine ou au mois comme chez l'épicier, et d'autres
évidemment ne payaient tout simplement pas car ils n'en
avaient pas les moyens, ce qui me fâchait car mon père
travaillait presque jour et nuit.
Un jour, je lui ai demandé de me donner quelques comptes
en souffrance que j'essaierais de collecter moi-même,
ce qu'il fit ; mais il avait une idée derrière
la tête et aujourd'hui je pense qu'il me voyait venir.
Je me rappelle la première famille, rue Marquette où
on me laisse entrer : père et mère, six enfants,
table de cuisine du temps, salon sans meuble (probablement le
dortoir des enfants) et cette menue femme qui me dit que présentement
elle ne peut rien me donner car elle n'a pas d'argent. Je suis
repartie chez moi, ai remis les comptes en souffrance à
mon père et je lui ai dit : "Ça va, j'ai
compris".
Les familles pauvres étaient souvent référées
par les Jésuites. On a vu un homme sonner à la
porte la veille du Jour de l'An et entrer dans le bureau de
mon père pour venir payer une visite que celui-ci lui
avait faite dix ans auparavant.
 Combien
d'accouchements a-t-il fait ?
Il nous a souvent dit qu'il avait mis environ 6,000 enfants
au monde, bien souvent à domicile (c'est quasiment rendu
une grosse ville si à tous les 20 ans ça double).
À 16 ans il m'a donné mon permis de conduire et
quand il avait une urgence, bien souvent je le conduisais. Je
me rappelle un accouchement à Rosemère, chez un
ami de la famille; lorsque j'ai pris la route 117, évidemment
à toute vitesse, il y avait une course de bicyclettes
escortée par la Police provinciale (aujourd'hui la Sûreté
du Québec). On nous a vite interceptés : mais
mon père lui expliquant le cas et alors on nous a ouvert
le chemin jusqu'à l'adresse indiquée.
Un jour il est parti faire un accouchement rue Bourbonnière
au sud de la rue Ste-Catherine. La famille attendait dans la
voiture (dont Louise et Louis, 2 et 5 ans). Une heure après,
il avait mis un petit garçon au monde et reprenait le
volant comme si de rien n'était. L'histoire nous a été
rapportée par la sur aînée du bébé
qui s'est retrouvée dans la même classe que Louise,
au Collège Jésus-Marie. Souvent il trouvait prétexte
d'une course à faire avec la famille pour inclure dans
le parcours 3, 4, ou 5 visites à domicile.
Une autre fois, Louis et maman étaient dans l'auto à
attendre mon père qui visitait un malade quand une voiture
de lait attelée à un cheval borgne s'est approchée
de l'automobile et l'a heurté. Le cheval qui était
borgne n'a pas vu la voiture stationnée et est rentré
dedans. Heureusement le laitier a pu le contrôler. Les
occupants en ont été quittes pour une bonne frousse.
Il a toujours fait des visites à domicile, même
à un âge très avancé.
De jour comme de nuit, toute sa vie, il pratique des accouchements
tantôt à domicile tantôt dans des hôpitaux
comme Sainte-Jeanne-d'Arc, la Miséricorde, Beaulac, Voghel.
Parfois, sa petite famille l'attend dehors dans la voiture.
Pour lui, voir naître un enfant est toujours une grande
joie, une source d'émerveillement.
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Propos
recueillis par Richard Ouellet auprès de Louis Dazé,
fils du médecin juin 2009 |
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Les accouchements dans les années
40 et 50
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Dans
les années 40, beaucoup de mamans accouchaient à
la maison, tout comme ma mère. Mais dans les années
50 et après, les mères allaient dans les hôpitaux
à moins qu'elles n'aient pas d'argent pour payer. À
Hôtel-Dieu, il ne se pratiquait pas d'accouchements parce
que, selon les religieuses, porter un enfant n'était pas
une maladie. Mon père allait donc à l'hôpital
Sainte-Jeanne-D'Arc sur la rue St-Urbain. À domicile, mon
père était toujours accompagné d'une infirmière.
Dès qu'il recevait l'appel de l'imminence d'un accouchement,
il téléphonait à l'infirmière et tous
deux se rencontraient chez la patiente. |
par
Louise Dazé, fille du médecin |
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Les années de
la crise |
Est-ce que les conditions d'hygiène
étaient déficientes ?
Cela dépendait de certains facteurs, entre autres les
systèmes de chauffage. Chez nous c'était au charbon,
par conséquent toute la cave était sale. Mais
les gens avaient l'eau courante, les égouts, un bain,
une douche, etc. Les rues étaient assez propres. Dans
les années 30, l'extrême pauvreté faisait
que des gens vivaient dans des taudis.
On vivait un peu dans la crainte des coquerelles qui nous arrivaient
à travers les sacs de pommes de terre. Il y avait les
sempiternels poux dans le cuir chevelu et aussi les puces dans
les matelas, dont il fallait se méfier. Dans les maisons
dont la cave était en terre battue, il y avait les souris.
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par
Louise Dazé, fille du médecin |
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6000 accouchements à Montréal
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Si je considère que mon père a
cessé les accouchements en 1967 (ou un peu avant?) et
qu'il avait commencé sa pratique en 1929, cela fait 38
ans. Le territoire couvert sur l'île de Montréal
s'étendait de Notre-Dame- de-Grâces à Montréal-Est
et de la rue Notre-Dame au Boulevard Gouin. Quelques familles
faisaient partie de ses patients à Ste-Rose et Laval.
Il a pratiqué aussi des accouchements dans le nord de
la ville (boulevard Gouin). Beaucoup de ses patientes qui déménageaient
lui restaient fidèles.
Mais je crois que la grande majorité des accouchements
ont eu lieu à l'hôpital Sainte-Jeanne-D'Arc, à
l'hôpital privé Beaulac et à l'hôpital
général de la Miséricorde. Il y a eu des
jumeaux et je crois, une fois, des triplés.
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par
Louise Dazé, fille du médecin |
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Mis à jour le :
21-sep-12
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d'Histoire et de Généalogie du Plateau-Mont-Royal
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